2024
Après Un jeune homme si tranquille, roman poignant sur la nature de l’amitié, ce nouveau roman d’Yves Viollier dit tant la force de l’amour que la puissance de l’engagement d’un jeune héros ordinaire.
C’est un voyage particulier. Un retour pour Simon à Mauthausen, lui qui s’est tu pendant soixante-cinq ans. Qui n’a jamais voulu se considérer comme un héros, qui s’est tourné au retour du camp vers la vie, vers Claude, son amoureuse depuis l’enfance. Les démons il y a peu sont venus habiter ses nuits. Signe qu’il lui fallait enfin retourner à Mauthausen, alors que le temps de vivre s’amenuise. Ce séjour de Simon et Claude va durer deux jours et trois nuits, éclairé par les petits gestes, les attentions, l’amour si bouleversant quand il est au long cours. Et si sous le manteau de neige immaculé reposent les souffrances indicibles, ce qui scintille pour toujours dans sa mémoire, ce sont les lueurs d’humanité.
« À quoi pensent les saumons quand ils ont franchi tous les obstacles et qu’ils retrouvent l’endroit où
ils sont nés ?
Ils pensent qu’ils ont fait tout ça pour ça. Ils pensent qu’ils vont pondre leurs oeufs.
Elle acquiesce, sourit, tend le bras et me tire de mon encoignure pour me rapprocher d’elle.
Je me laisse glisser sur le siège, m’appuie contre son épaule.
Ils pensent qu’après ils vont pouvoir mourir tranquilles. »
Crédit photo : Philippe Matsas
Jours de présence : vendredi à partir de 16h, samedi, dimanche matin et début d’après-midi
2023
Yves Viollier est né en Vendée, région qui lui a inspiré plus d’une dizaine de romans, dont Même les pierres ont résisté (prix Charette), Les Sœurs Robin (prix du Roman populaire, adapté pour la télévision avec Line Renaud et Danielle Lebrun) et Les Pêches de vigne. Il a obtenu, entre autres, le prix Charles-Exbrayat pour Les Lilas de mer et le Grand Prix catholique de littérature pour L’Orgueil de la tribu. Il est l’auteur aux Presses de la Cité de Y avez-vous dansé, Toinou ?, Le Marié de la Saint-Jean, La Nuit d’après et C’était ma petite sœur. Il est critique littéraire à La Vie et se partage aujourd’hui entre la Vendée et la Charente.
Antoine ne veut rien perdre du temps de l’enfance et des chemins creux de Château-Fromage. C’est son socle. Tout part de là. Sa mémé Lise le prenait par la main et lui ouvrait les yeux au monde. Il pédalait sur son vélo et éprouvait ses premiers émois auprès de Cocotte, la garde-barrière. Son horizon tutoyait l’infini.
Et les voix, les gestes, les bonheurs et les souffrances de ceux qui l’ont aidé à grandir sont autant de diamants de la mémoire. Olympe qui aimait les hommes, Irma qu’on a mal aimée, Marcellin que l’amour a fui, Henri qui est allé le chercher de l’autre côté de la terre. C’est le regard du mémorialiste des vies ordinaires qu’Yves Viollier pose avec douceur sur ses personnages.
Crédit photo : DR
Jours de présence : Vendredi après-midi, samedi matin et dimanche matin
2020
Le père et la fille se tenaient par la main, les yeux fermés. On aurait dit qu’ils dormaient.
« On les a trouvés ainsi que je le raconte dans leur maison des Ombrages. C’était après la Grande Guerre, au Gué-des-Marais. En ce temps-là, on ne pardonnait pas le suicide. Alors, le père et la fille !
Louise était une jeune artiste-peintre au talent précoce qui exposait déjà dans les salons en compagnie des plus grands. Elle avait un bel avenir. La loi du silence a pesé sur le village. Des bruits ont couru. Mais on n’a jamais clairement élucidé le mystère de leur tragédie.
Je suis allé tourner dans ce pays d’eau et de ciel aux couleurs changeantes qu’on appelle Venise verte. On ne m’a presque rien dit. C’était sensible encore. J’ai lu les journaux de l’époque et recherché des tableaux de celle qui m’a inspiré cette histoire, et que j’ai prénommée Louise, dans sa maison natale que j’ai baptisée Les Ombrages. Et j’ai essayé de remonter par le roman les chemins d’un destin qui les a décidés à se prendre par la main. Pour qu’ils revivent. Et que nous apprenions à les connaître. Afin, peut-être, que nous les aimions. »
2023
Yves Viollier a reçu au long de sa carrière plusieurs prix littéraires : prix Charles-Exbrayat pour Les Lilas de mer, prix du Roman populaire pour Les Soeurs Robin – adapté en 2006 par Jacques Renard avec Line Renaud et Danièle Lebrun –, prix Charette pour Même les pierres ont résisté, Grand Prix catholique de littérature pour L’Orgueil de la tribu. Et plus récemment le prix Montesquieu pour L’Instant de grâce.
J’ai posé la question à mon oncle, la dernière fois que nous nous sommes vus, il y a plus d’un an, il était encore en pleine forme. « Est-ce que tu as parlé à tes amis ? » Il m’a répondu : « Je n’ai pas encore osé… » Roger Martin les a séduits. Il a été accueilli dans ce bourg dont le narrateur est le maire, comme un ami de toujours. Veuf, à plus de soixante-dix ans, il avait besoin d’une famille. Et tous lui ont ouvert les bras. Il est devenu le père, le grand-père, le vieil homme que les jeunes aiment bien. La déception a été aussi violente que l’amour et l’amitié avaient été doux. Le fil du temps s’est tendu. Roger, en jeune homme, est alors apparu dans sa vérité. L’Occupation avait été ce théâtre où il a joué= un rôle funeste. Écrivain de l’épure, Yves Viollier, avec ce texte chaleureux et glaçant à la fois, dont le sujet est dessiné avec la plus grande humanité, pourrait prendre pour sienne la devise simenonienne : « Comprendre et ne pas juger. »
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